Rick le Cube, vers un nouveau monde

10 Juil 2021 | Reportage Corporate AV

VIVANT ET INTERCONNECTÉ

Concert cinématographique pour jeune public à la croisée des musiques acoustiques et électroniques, des arts numériques et du road movie, « Rick le Cube » revient sur scène avec de nouvelles aventures. En attendant de pouvoir reprendre la route, toutes les dates ayant été reportées à 2022, nous avons pu assister à un filage du ciné-concert, sans public mais streamé en direct au Stereolux. C’est depuis cet incubateur nantais orienté musiques actuelles et arts numériques que nous avons soulevé le couvercle des marmites dans lesquelles mijotait un concentré de matière grise, faisant appel à une solide connaissance en matière de gestion de réseaux et de multidiffusion.

En 2009, SATI, le collectif que forment Jesse Lucas (musicien, compositeur, concepteur graphique), Erwan Raguenes (musicien multi-instrumentiste, chasseur de sons) et Jacques-Yves Lafontaine (ingé son sono/studio et Géo Trouvetou à ses heures creuses) imagine un premier spectacle audiovisuel pour très jeune public, « L’Odyssée de Rick le Cube ». Celui-ci raconte les aventures d’un personnage muet, Rick, petit œuf rejeté par ses congénères en raison de sa différence physique. Il se lance sur les chemins pour un voyage à la découverte du monde, où il traversera une multitude de contrées imaginaires, jusqu’à une usine étrange qui lui révélera les secrets de sa naissance. En 2015, le deuxième spectacle, « Rick le Cube et les Mystères du temps », voit le jour. Puis, en 2019, Rick souffle 10 bougies et affiche un joli palmarès de quatre tournées successives, totalisant 700 représentations partout en France, en Europe, et jusqu’en Chine, sous la bannière de L’Armada Productions, une entreprise spécialisée dans les spectacles jeunesse. En pleine pandémie, Rick le petit futé parvient à se glisser sous les projecteurs entre deux confinements avec un troisième opus, « Rick le Cube, vers un nouveau monde », qui, certes, ne pourra pas prendre la route avant 2022, mais dont toutes les dates – à l’exception de quelques festivals – ont été maintenues. De quoi donner du baume au cœur à notre trio, qui attend avec impatience de pouvoir « roder » ce tout jeune spectacle, qui n’a jamais que neuf dates d’existence depuis sa création en octobre 2020 !

L’équipe de Stereolux, de L’Armada Productions et du SATI au complet

IMMERSION VISUELLE ET SONORE

Si l’image des deux premiers films fut réalisée de manière traditionnelle – collage numérique dans After Effects pour le premier et cinéma 4D pour le deuxième –, c’est le moteur de jeu vidéo Unity qu’a choisi son créateur Jesse Lucas pour rendre le dernier film encore plus interactif. Comme tout se passe en temps réel, si une action met le film en pause, les personnages principaux arrêtent d’avancer, mais tout le reste (papillons, oiseaux, fumées) continue à vivre.

Afin d’immerger son public dans une bulle audiovisuelle et de le propulser dans un voyage porté par une bande son onirique, SATI a imaginé de nombreux dispositifs pour faire de ce spectacle un écosystème unifié où tout semble interconnecté : les musiciens, le public, les machines en réseau et les lumières. Jesse et Erwan ont sélectionné une palette d’instruments plutôt rattachés aux musiques du monde, comme la guitare lap steel, le mélodica, l’ocarina ou la kora, mais aussi des instruments électroniques manipulés sur scène.

COMPRENDRE CE QU’ON ENTEND

Dans un esprit pédagogique, et pour que le public s’intéresse autant à l’action du film qu’au concert qui se déroule en direct sous ses yeux, les deux musiciens privilégient une approche organique en jouant sur l’improvisation et la manipulation des machines sur scène. Un exemple : les musiciens utilisent l’Organelle de Crit-ter & Guitari, un petit clavier synthétiseur dont le cœur est composé d’un moteur audio qui permet de lire des patches écrits dans le logiciel Pure Data, puis chargés à l’intérieur de la machine. Jesse Lucas et Erwan Raguenes ont donc la possibilité de « fabriquer » n’importe quel instrument dans Pure Data et de le jouer sur scène grâce au petit clavier et aux boutons rotatifs. Pour les séquences électroniques plus énergiques, ou pour les scènes de pilotage du vaisseau, par exemple, SATI utilise un synthétiseur modulaire.

VOIR LE SON

La scénographie intègre cinq triangles lumineux qui représentent concrètement le son ou la boucle sonore. Grâce à un Beyer M88 placé à cour, l’un des musiciens peut enregistrer le son lorsqu’il joue d’un instrument, que le second musicien manipule en direct grâce aux triangles, sur lesquels des commandes permettent d’inverser le sens de la lecture, d’envoyer un effet d’écho, d’augmenter ou de diminuer la hauteur du son (pitch, note) et de représenter visuellement les improvisations en musique électronique. Vous suivez ? Voici un exemple d’interaction : on demande au public de frapper des mains à un instant précis pour passer une porte. Deux micros canon de part et d’autre de la scène captent le signal, que Jacques-Yves Lafontaine traite dans la console et renvoie sur un Aux. Erwan reçoit ce signal, le gère dans Max et le transmet au réseau en OSC. Si le message arrive au bon moment, Unity ouvre la porte dans l’image et renvoie au séquenceur, qui accélère le tempo. Si le message parvient trop tôt ou trop tard, la porte ne s’ouvre pas et le tempo ralentit. OK, dans une salle vide, tout cela ne signifie pas grand-chose, mais imaginez une jauge pleine (250 âmes, bambins et leurs accompagnateurs) trépignant lorsque Rick emprunte un train, qui gagne en vitesse grâce à l’ouverture de plusieurs portes. Dans une autre scène, les musiciens invitent le public à vocaliser en groupe pour activer une machine qui convertit les vibrations sonores en une énergie gigantesque. C’est une manière d’inciter les spectateurs à agir collectivement pour faire avancer l’histoire.

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