DELTA t – CHAP. 4 : DEPHASAGES DE FILTRAGE
Un article d'
Eric Moutot
Déphasage d’égalisation, délai et temps de propagation de groupe
Bien qu’employée un peu à tort et à travers, la notion de phase, ou de déphasage, indique en fait un délai pour une fréquence donnée. Plus précisément, le décalage temporel entre deux signaux, l’un servant de référence. Qu’ils soient analogiques ou numériques (mettons à part les filtres FIR), les correcteurs de tonalité introduisent des décalages de phase, dont l’angle varie suivant la fréquence considérée. La notion de « délai de groupe » ou « temps de propagation de groupe » exprime ces décalages.
Le principe d’un égaliseur est d’introduire dans la zone de fréquence choisie un décalage – un déphasage – entre le courant et la tension, pour modifier le niveau. Dans un signal comme ceux que l’on trouve tous les jours, avec ses harmoniques qui définissent son timbre et sa texture sonore, les nombreuses composantes fréquentielles qui le constituent, toutes alignées temporellement au départ, vont se retrouver décalées entre elles après le passage dans un égaliseur, qu’il soit actif ou passif, analogique ou numérique. La variation de phase est continue, et d’autant plus importante que l’on se situe à proximité de la fréquence d’accord ou de coupure. La pente du filtre (exprimée généralement en dB/octave) influence aussi cette rotation. Plus elle est importante, plus le retard est marqué. Prenons le cas d’un filtre passe-haut, tel que nous l’utilisons très fréquemment pour éliminer des composantes indésirables, hors du spectre de la source. Un passe haut d’une pente de 6 dB/oct va présenter une rotation de phase de 90°, on obtiendra 180° pour 12 dB/oct, 270° pour 18 dB/oct et ainsi de suite. Convertissons maintenant ces valeurs en temps. A 12 dB/oct, la rotation de 180° correspondant à une demie période. Pour une fréquence de coupure à 100 Hz, la période T = 1/F, soit 10 ms. Le retard induit par le filtre à proximité de 100 Hz sera de 5 ms, l’équivalent du temps que met le son pour parcourir plus de 1,5 m. On voit que ce retard induit n’a rien d’anecdotique par rapport aux opérations de « remise en phase » de nos signaux que nous avons pu réaliser jusqu’alors. En conclusion, nous pouvons dire que tout filtrage d’un signal va induire des retards variables suivant les fréquences. Notre modulation sera en quelque sorte déstructurée temporellement. Donc, moins on réalise de corrections, mieux on préserve l’intégrité temporelle de notre signal. Et plus nos corrections seront douces, plus les conséquences de phase seront limitées. Abuser des notchs, dont les pentes sont par définition très raides, a des conséquences importantes sur la phase…
DANS LA RUBRIQUE SON, LIRE AUSSI...